vendredi, mai 18, 2007

Le coma

Tout devient minéral en moi: le corps, la tête, je ne sais si je suis comme une pierre creuse, sans pensées, sans sens, ou bien si tout est tellement durci, comme du plomb, que rien ne pénètre. Depuis le temps, je n'ai pas encore compris le système de cet état comateux. Il est une chose sure, c'est que dans cet instant de vide il y a déconnections des centres nerveux puisque sans faiblesse organique, d'un coup mes pieds se dérobent sous moi et je tombe comme une masse, sans réflexe aucun pour me retenir, sans crispation non plus, puisque décontractée je ne me fais jamais aucun mal. C'est un fait qui me paraît étrange qu'une douleur, un chagrin psychique puisse être d'une telle intensité à vitrifier un être humain sans qu'aucun organe, coeur, foie, rate, viscères, ne soient impliqués, et somme toute demeurent en parfaite santé...Sauf le manque d'appétit à vivre, à remettre un pied devant l'autre, à être séduit, si ce n'est à être dénoué par l'objet même de son malheur. Alors, l'idée du suicide est trop embryonnaire dans un cerveau où je ne peux juxtaposer une pensée sur l'autre, pour réfléchir à une exécution possible...Ainsi le temps passe...Quelques minutes...quelques heures...ou quelques jours...jusqu'au hasard d'un coup de fil, d'une rencontre qui me fasse bouger, m'égaie à ne pas attrister autrui, ce qui fait dire que je suis drôle à raconter mes malheurs : Les malheurs d'une bécassine moderne! dit Nathan. C'est un endormissement qui n'implique aucune rage, aucune rancoeur, aucune violence contre autrui, aucun besoin, aucune exigence, puisque telle une plante je demeure minéralement en vie. C'est ainsi que je rêve la folie: être pétrifiée comme le héros de "L'Homme au Crâne Rasé" d'André Delvaux. Le plus beau plan fait sur "la folie" au cinéma: un homme qui croit avoir tué son amour, soit pour oublier le meurtre, soit pour ne pas oublier son amour, il s'endort doucement dans un gros plan séquence qui dure des minutes...

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